De la technologie... aux marchés
FRONTIERES DU FUTUR : De la technologie... aux marchés
Il y a vingt ans dans Les Echos, le Quotidien de l'Economie...
Le vert "technologique", le noir, le blanc, les grilles quadrillées, le jargon des spécialistes, les consonnances douces des noms d'entreprises "nouvelles" : c'était le deuxième Forum européen IBM PC et Compatibles, à la Porte Maillot.
Le rouge et or, les ballons, Ronald, le célèbre clown, c'est le nouveau restaurant McDonald de la rue de Rivoli.
Les marchés sont différents, et la culture aussi ; mais la juxtaposition de ces deux évènements met mieux en valeur cet enjeu des entreprises porteuses de technologies nouvelles : passer de la technologie aux marchés.
Rue de Rivoli, McDonald récidive et signe son dix-neuvième restaurant français : McDonald spécialiste de la "restauration familiale". On reconnaît le décor pour les petits et les grands, l'aire de jeu avec le manège, la propreté des lieux, les repas sur mesure, le service immédiat, le confort alimentaire... et l'accueil.
Alors, foin du fast-food ?
On se rappelle que ce terme décrivait à l'origine un processus de production - la rapidité dans la préparation et le service du repas - plutôt qu'un phénomène de marché, la consommation rapide.
McDonald abandonne le label à sa concurrence traditionnelle et aux nouveaux venus ; pour se positionner en fonction du marché qu'il a décidé d'occuper. Mais bien évidemment, et peut-être mieux qu'avant, McDonald s'appuie sur son excellente maîtrise de la technologie - on reprend l'essentiel pour mieux le dépasser. Et pas n'importe comment.
McDonald l'utilise pour ritualiser des valeurs établies, sous une forme à la fois économique et marquante. L'enjeu est évident pour McDonald, sa concurrence d'hier, et pour les entreprises porteuses de technologies nouvelles qui, un jour ou lautre, seront confrontées aux mêmes décisions.
Dépasser sa technologie, la mettre au service de la conquête d'un marché, ne reconnaît-on pas là un principe auxquels se soumettent les plus grands ?
Un principe de toujours, mais peut-être pas encore assez intégré dans l'expérience et la mémoire, puisque ses applications font encore les nouvelles - voire commandent l'admiration :
- IBM attend que le marché soit prêt pour ouvrir sa famille au PC ;
- Philips, dans la même logique, décide de renoncer au lancement de son lecteur de vidéodisque grand public, pourtant technologiquement prêt ;
- Sony baptise son microlecteur de cassette le Walkman, et tente ainsi de baliser le marché convoité avec le comportement des utilisateurs potentiels.
Quant aux entreprises dont la jeunesse les soumet encore au paradigme technologique, de la même manière, elles vont devoir s'ancrer sur un marché.
Pour s'y préparer, elles inscriront bientôt dans leur culture les réponses qu'elles envisageront d'apporter aux questions que McDonald n'a probablement pas attendu 30 années d'existence et 50 milliards de hamburgers vendus pour se poser.
Peut-on voir, dans la modélisation des réponses à ces questions, un embryon d'une technologie dont, nombreuses, les industries et les nations se montreront gourmandes dans le siècle qui s'annonce ?
Pouvons-nous consolider ensemble cette technologie exportable dont nos voisins exploitent déjà les effets jusque chez nous ?
François-Noël TTISSOT
Une Identité Pour Demain
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